lundi 7 décembre 2015

L’héritage des filles, la Moudawana et le droit positif


Encore aujourd’hui, bon nombre de ventes de biens immobiliers hérités par des filles et leur parentèle très étendues d’héritiers mâles par les mâles,  sont réalisées. Le prix de la vente ne monte généralement pas très haut, puisque souvent les héritiers n’ont comme quote-part qu’une  somme  dérisoire. Les lointains « héritiers » mâles, de différents milieux sociaux, justifient leur acte par  la sacralité des règles de succession !


            Ces règles ancestrales motivées par le souci de  cohésion  familiale ont aujourd’hui pour résultat l’effet inverse… 


La législation marocaine en matière d’héritage est conforme au droit musulman malékite en vertu duquel la fille hérite la moitié de la part de son frère. Si par malheur cette fille n’a pas ce  frère privilégié, elle viendra en concurrence dans la dévolution successorale de son père avec ses oncles paternels ou plus largement les héritiers mâles parents par les mâles.  


Si la remise en cause des règles de dévolution successorales et leur sacralité commence à se faire entendre, elle se fait, cependant, timidement.  « Mon expérience personnelle sur une période de plus de vingt années est de constater l’émergence  d’une volonté de renforcer la cellule familiale ainsi que l’abandon  du comportement fataliste  face au statut de la fille  en matière de succession », explique un notaire, spécialisé dans l’héritage des femmes. S’il  a, à présent, la possibilité de contacter un notaire, notamment en matière d’acquisition immobilière, bon nombre consultent l’adoul, fidèle aux préceptes religieux.  A la différence de ce dernier, le notaire  contribue à l’éveil des mentalités en invoquant et en explicitant que ces règles pénalisantes pour les filles ne sont pas  immuables et que  du vivant des parents une réorganisation est envisageable.


            « De nombreuses fois j’ai assisté avec satisfaction au soulagement des parents soucieux de protéger leur fille, grâce aux  éclaircissements apportés  et  à la présentation de solutions appropriés pour sauvegarder le patrimoine familial, des ingérences extérieures ou tout simplement assurer l’égalité des parts entre frère et sœur », poursuit la même source. Cette démarche n’a pas toujours  été évidente. Malgré les siècles de mentalités pesantes, la question devient plus aisée grâce à la promulgation récente du Dahir  du  22 novembre 2011  sur les Droits réels.   


            Le premier principe ayant toujours existé est que du vivant des parents ceux-ci peuvent faire donation entre vifs à titre gratuit et irrévocable de leur patrimoine à toutes personnes, héritières ou non. Or les règles régissant la donation en général n’ont été codifiées que depuis la promulgation du Dahir du  22 novembre 2011 sur les Droits réels. En effet, jusqu’à cette date les règles résultaient des interprétations des jurisconsultes musulmans et sont demeurées souvent obscures pour la majorité. De plus, les conditions de validité et le principe de révocabilité ou d’irrévocabilité restaient  flous et n’offraient aucune garantie de sécurité face aux risques des actions en nullité déposées devant les tribunaux par les héritiers putatifs arguant la spoliation.


            Le deuxième principe juridique pouvant être présenté aux parents soucieux d’agir dans le sens des intérêts de  leur fille, est celui du démembrement du droit de propriété, qui consiste à dissocier l’usufruit  de la nue- propriété.  L’attribution à la fille de la nue-propriété  d’un bien immobilier par voie de donation ou d’acquisition , en créant un usufruit au profit des parents par voie de rétention ou par acquisition permet l’exclusion de ce bien de l’actif sur lequel portera la dévolution successorale, car l’usufruit étant un droit viager il disparaît au décès du bénéficiaire et est automatiquement dévolu au bénéficiaire de la nue-propriété


            Les avantages de  la codification des dispositions réglementant la donation sont inestimables car ils  autorisent une plus large diffusion des avantages de la donation.             A cet effet l’une des conditions de validité est le principe de dessaisissement, en droit musulman une donation valable implique que le donateur ne soit plus en possession du bien et que la jouissance soit effective et réelle au profit du donateur. Mais l’on sait tous que cette condition fait très souvent obstacle. Elle fait l’objet d’interprétations contradictoires mettant un frein à la donation de la nue-propriété en faveur de la fille.   


Toutefois beaucoup espèrent que ces démarches restent secrètes, pour éviter toutes justifications de leur vivant avec les héritiers…Caricature: Jeune Afrique            

mercredi 8 juillet 2015

Manifestation mondaine des libertés



                             

Rendez-vous à 22h30, place des Nations unies de Casablanca. Le sit-in des libertés débute et les premiers slogans se font entendre. « Porter une jupe n’est pas un crime », « égalité homme/femme »… Si lors de la manifestation des jupes, plusieurs femmes portaient des robes pour soutenir les deux jeunes filles d’Inezgane, lundi 6 juillet les femmes portaient robes signées, talons hauts et maquillage. Loin de la tenue idéale pour une manifestation… qui de surcroît pourrait mal tournée. Étaient-ils sûrs que tout se passerait bien ? Ou attendaient-ils les caméras et les photographes, affublés de la sorte ? Célébrités de la scène médiatique marocaine offraient interviews aux journalistes et photos avec les fans. Au bout de seulement 45 minutes, la manifestation s’est achevée, sur ordre de quelques participants, se distinguant en tant qu’organisateurs, un poste auquel personne ne les a nommés. Un groupe se rassemble alors en scandant les mots « Dieu, la Patrie, le Roi ». S’ils font beaucoup de bruit, ils ne revendiquent cependant rien. Voyant ces jeunes gens, le gratin casablancais a préféré fuir rapidement de peur d’être mélangé ou amalgamé… 

Source photo: Page Facebook "journée nationale pour défendre nos libertés".