mardi 22 juillet 2014

J'ai testé pour vous ... le système judiciaire marocain

  

Généralement on pense que les tribunaux marocains prennent un temps fou à régler des affaires même mineures. Rares sont ceux qui communiquent dessus et on garde encore une image plutôt négative sur le sujet. J'ai donc pris mon courage à deux mains et décidé -non pas décidé ça m'est tombé dessus- de tester les tribunaux marocains.


Tout commence le troisième jour de Ramadan où mon portable est volé. Suite à une plainte déposée au commissariat le plus proche, je pensais que c'en était fini : il faut l'avouer, la plupart de nos plaintes pourrissaient jusqu'ici au fond d'un placard d'archives sans jamais en ressortir! En tout cas c'est ce que je pensais.


15 jours plus tard, l'appel d'un officier me surprend en m'apprenant que le voleur a été arrêté et que je suis attendue pour le reconnaître. Au commissariat je me retrouve face à lui ( pas top top la protection des témoins) et confirme son identité. Je signe un papier et là autre surprise : je suis convoquée au tribunal deux jours après.


Devant le tribunal, les estafettes de police pleines de jeunes délinquants débarquaient les unes après les autres avec un laps de temps d'une demi-heure en moyenne. Le constat est flagrant et alarmant, cette semaine, c'était une soixantaine de jeunes entre 15 et 25 ans qui en étaient déjà à leurs premiers délits.


Chez le procureur, seuls les témoins entrent. Ils parcourent un long couloir rempli d'archives pour arriver dans un autre couloir avec des bancs en bois. A quelques mètres d'eux... les accusés qui se penchent pour voir si leur détracteur est là.


Les groupes d'accusés sont appelés selon leur arrondissement, et montent à l'étage suivi des témoins. A l'étage un petit couloir mène au bureau du procureur. Ce petit couloir est plein de jeunes délinquants de l'arrondissement concerné et les témoins passent un à un devant eux. (oui oui ils ont eu le temps d'enregistrer nos têtes!)


Dans le bureau, l'accusé est placé à un bout de la pièce et le témoin à l'autre, séparés par un officier. Le procureur demande la version de chacun et le témoin doit décider si oui ou non il retire sa plainte. Si NON, l'accusé met ses empreintes sur la plainte et est enfermé de suite dans la cellule du tribunal en attendant le jugement.



   

Autre surprise de la journée, le jugement a lieu quelques minutes plus tard. La salle est telle qu'on la voit dans les films : en bois massif, espacée, avec des sièges pour chaque partie (juge, accusés, avocats, témoins et accompagnateurs).

Entrées des accusés et des avocats. A l'arrivée du juge, tout le monde se lève puis se rassoit. Le groupe des accusés ayant un avocat passe en premier. C'est le tour ensuite de ceux qui n'en ont pas. Le témoin doit se lever lorsque la personne qu'il accuse est appelée à la barre. Debout à 2 mètres de l'accusé il doit donner son nom et expliquer comment a eu lieu le délit. Cela dure moins de 2 minutes et le jugement tombe.


En conclusion, maintenant les tribunaux marocains sont plus efficaces et plus rapides qu'avant, contrairement à l'idée erronée que j'en avais. 

Une note particulièrement positive pour l'officier qui a prit en charge ma plainte : il m'a expliqué étape par étape ce que je ferai au tribunal, par quoi je passerai et avec qui je parlerai, un effort de communication est bel et bien présent.
Deux lacunes cependant : la première au niveau du surplus de face à face accusé/témoin et la deuxième, et pas des moindres, personne n'a vérifié mon identité à aucun moment...